Douleur lombaire chez les athlètes de force : quand le contrôle lumbopelvien fait-il la différence ?

Table des matières

Introduction

Dans le monde de la musculation, et particulièrement chez les athlètes de force comme les powerlifters, la gestion de la douleur et la prévention des blessures au bas du dos sont des préoccupations majeures. En effet, le bas du dos est souvent soumis à des contraintes importantes, notamment lors des mouvements de squat et de soulevé de terre, qui font partie des épreuves incontournables en powerlifting. Les douleurs lombaires affectent une grande proportion des athlètes de force (Larsson et al., 2023), et ces douleurs peuvent perturber non seulement les performances sportives, mais aussi le quotidien de l’athlète, tant au niveau professionnel que personnel. Dans ce contexte, le contrôle du mouvement lumbopelvien, c’est-à-dire la capacité à maintenir une stabilité optimale au niveau des hanches et du bas du dos lors des mouvements, est considéré comme un facteur clé pour éviter les blessures et atténuer les douleurs existantes.

Pour mieux comprendre le lien entre le contrôle du mouvement et la douleur lombaire, l’étude menée par Larsson et ses collègues (2023) s’intéresse spécifiquement aux powerlifters. En se basant sur des recherches antérieures qui avaient montré que des tests de contrôle du mouvement lumbopelvien pouvaient discriminer entre des individus souffrant de douleurs lombaires et ceux qui n’en souffraient pas (Luomajoki et al., 2008), les chercheurs ont voulu tester si ces mêmes outils diagnostiques pouvaient également différencier les powerlifters souffrant de douleurs lombaires de ceux qui n’en ont pas. L’étude vise donc à déterminer si une série de tests de mouvement peut être utilisée comme indicateur fiable de la douleur lombaire chez les athlètes de force, une population dont la morphologie et les schémas de mouvement spécifiques pourraient influencer l’efficacité de ces tests.

Comprendre le contrôle du mouvement lumbopelvien et son lien avec la douleur lombaire

Modèles de douleur et contrôle du mouvement

Dans le domaine de la rééducation musculosquelettique, la compréhension de la douleur évolue rapidement. Pendant longtemps, le modèle biomédical de la douleur, qui lie directement la douleur à des lésions tissulaires ou des anomalies structurales, a dominé. Cependant, de plus en plus de recherches montrent que la douleur est une expérience complexe, influencée par de multiples facteurs autres que des dommages physiques (Pomarensky et al., 2022). Cette approche, appelée modèle biopsychosocial, considère la douleur comme une interaction entre les aspects biologiques, psychologiques et sociaux. Cela signifie que, pour certaines personnes, des facteurs comme le stress, l’anxiété ou les expériences passées peuvent influencer la perception de la douleur, indépendamment de l’état physique du corps.

Les tests de contrôle du mouvement : histoire et utilité

Le contrôle du mouvement lumbopelvien fait référence à la capacité de stabiliser et de coordonner les mouvements au niveau des hanches et du bas du dos. Ce contrôle est souvent évalué par des tests spécifiques qui visent à identifier des schémas de mouvement inhabituels ou “défaillants” pouvant indiquer un risque de douleur ou de blessure. Des études antérieures, telles que celle de Luomajoki et al. (2008), ont montré que ces tests de mouvement peuvent distinguer les personnes souffrant de douleurs lombaires des personnes en bonne santé. En théorie, une altération du contrôle du mouvement pourrait augmenter la tension au niveau de la colonne vertébrale, rendant cette zone plus vulnérable aux douleurs.

L’objectif de l’étude chez les powerlifters

Les powerlifters constituent une population unique du fait de leur entraînement intense et de la charge élevée imposée à leur corps. Les schémas de mouvement adoptés par les athlètes de force sont souvent différents de ceux des non-athlètes, et les adaptations musculaires et squelettiques qui en découlent peuvent modifier leur façon de bouger. Tester le contrôle lumbopelvien dans cette population peut fournir des informations essentielles : les powerlifters souffrant de douleurs lombaires présentent-ils réellement des altérations dans leur contrôle du mouvement par rapport à ceux qui n’en souffrent pas, et ces altérations peuvent-elles être identifiées de manière fiable pour guider des interventions thérapeutiques ?

Objectifs et hypothèses de l’étude

Objectifs de l’étude

L’étude menée par Larsson et al. (2023) avait pour but principal d’évaluer le lien entre le contrôle du mouvement lumbopelvien et la présence de douleurs lombaires chez les powerlifters. Plus précisément, les chercheurs visaient à répondre à deux questions essentielles :

  • Existe-t-il une différence dans le score global de contrôle du mouvement lumbopelvien entre les powerlifters avec douleur lombaire et ceux sans douleur ? Cette première question permettrait de déterminer si un test de contrôle du mouvement peut effectivement différencier les athlètes souffrant de douleurs lombaires des autres.
  • Y a-t-il des différences dans des tests spécifiques de contrôle du mouvement, notamment ceux évaluant le contrôle de la flexion lumbopelvienne, entre les groupes ? Cette seconde question cherche à examiner plus en détail des types de mouvements spécifiques susceptibles de différencier les individus souffrant de douleurs lombaires, surtout ceux impliquant des mouvements de flexion, qui sont souvent sollicités dans les exercices de force comme le squat et le deadlift.

Hypothèses de l’étude

Les chercheurs ont formulé une hypothèse principale en deux volets :

  • Les powerlifters souffrant de douleurs lombaires auraient un contrôle du mouvement altéré par rapport aux powerlifters sans douleurs, ce qui devrait se manifester par un score global plus élevé (indiquant une moins bonne maîtrise du mouvement).
  • Les tests mesurant le contrôle de la flexion lumbopelvienne montreraient des différences significatives entre les deux groupes, car la flexion est un mouvement critique dans la pratique du powerlifting et pourrait être un facteur de risque de douleur s’il est mal contrôlé.

En structurant ces objectifs et hypothèses, l’équipe de recherche souhaitait explorer si les tests de contrôle lumbopelvien, utilisés jusqu’ici principalement chez des populations non-athlétiques, pouvaient aussi s’avérer efficaces pour détecter des dysfonctionnements spécifiques dans une population d’athlètes hautement spécialisés.

Sujets et méthodes : Comment l’étude a été menée

Participants et critères d’inclusion

L’échantillon de cette étude comprenait 40 powerlifters affiliés à la Fédération suédoise de powerlifting, un groupe composé de 12 athlètes souffrant de douleurs lombaires et 28 sans douleur. Ces athlètes présentaient des niveaux d’entraînement et des habitudes de compétition comparables, garantissant une certaine homogénéité des participants.

Pour être inclus dans l’étude, les participants devaient répondre aux critères suivants :

  • Avoir un score de douleur d’au moins 1/10 au niveau de la région lombaire, avec une douleur persistante depuis au moins quatre semaines pour être classé dans le groupe des individus ayant des douleurs lombaires.
  • Présenter une limitation dans leur pratique du powerlifting en raison de la douleur, mesurée à l’aide d’une version adaptée de l’échelle fonctionnelle spécifique au patient (Stratford et al., 1994).

Ces critères garantissaient que les athlètes inclus dans le groupe « douleur » présentaient des symptômes suffisamment importants pour affecter leur performance sportive, assurant ainsi que l’étude se concentre sur des douleurs réellement handicapantes pour la pratique du powerlifting.

Procédure de test et collecte des données

Les chercheurs ont mis en place un protocole d’évaluation en deux étapes :

  • Questionnaires d’auto-évaluation : Les participants ont d’abord rempli des questionnaires concernant leur douleur, leur fonctionnalité dans le sport, et des informations démographiques. Ces questionnaires ont permis de recueillir des données de base sur la douleur et les limitations fonctionnelles de chaque participant, servant de référence pour l’analyse.
  • Évaluation du contrôle lumbopelvien : Après les questionnaires, un kinésithérapeute a effectué une évaluation en ajustant la posture de chaque participant en position neutre, basée sur leur amplitude de flexion et d’extension. Les participants ont ensuite réalisé trois répétitions de chacun des sept tests de contrôle du mouvement, visant différents aspects du contrôle lumbopelvien (flexion, extension, rotation, et décalage latéral).

Tests de contrôle du mouvement et critères d’évaluation

Les tests utilisés, décrits initialement par Luomajoki et al. (2007), visaient à mesurer divers aspects du contrôle lumbopelvien :

  • Contrôle de la flexion : tests comme le “Waiter’s bow” et l’extension des genoux en position assise, souvent sollicités en powerlifting.

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