Deadlift : Que choisir entre Touch-and-Go et Dead Stop

Table des matières

Introduction

Le deadlift conventionnel est l’un des exercices les plus puissants et efficaces pour travailler la chaîne postérieure. En sollicitant une large gamme de groupes musculaires, dont les ischio-jambiers, les fessiers, et plus largement le dos, le deadlift est un pilier pour développer la force, la puissance et l’hypertrophie musculaire. Cet exercice, réputé pour son intensité et sa capacité à stimuler la croissance musculaire, est également un excellent indicateur de la force physique générale d’une personne.

Dans le cadre du deadlift conventionnel, deux styles de répétition prédominent : le touch-and-go et le dead stop. Le touch-and-go implique de réaliser des répétitions continues sans laisser reposer la barre au sol entre les répétitions, permettant ainsi d’exploiter l’élan et le cycle d’étirement-raccourcissement des muscles. En revanche, le dead stop consiste à faire une pause complète entre chaque répétition, la barre reposant sur le sol, ce qui requiert une force de départ à chaque nouvelle répétition sans bénéficier de l’élan précédent.

Le choix entre ces deux méthodes peut avoir un impact significatif sur les résultats d’entraînement, influençant la performance, le développement musculaire et le risque de blessure. Selon l’étude de Krajewski et al. (2018), “A Biomechanical Analysis of the Effects of Bouncing the Barbell in the Conventional Deadlift”, il existe des différences biomecaniques notables entre ces styles, affectant la charge articulaire, le travail total et la performance concentrique. Comprendre ces nuances semble pertinent pour optimiser l’entraînement en fonction des objectifs spécifiques de chacun.

Questions de recherche et hypothèses

Question de recherche

La question centrale que se posait l’étude était : “Quelles sont les différences biomécaniques et de performance entre les deadlifts conventionnels en touch-and-go et en dead stop ?”. Cette interrogation s’inscrit dans une volonté de comprendre en profondeur les impacts physiologiques et mécaniques de chaque méthode, notamment en termes de sollicitation articulaire, de travail mécanique effectué par le corps, et de l’efficacité de la performance. En répondant à cette question, les auteurs cherchaient à fournir une base de données scientifique permettant d’optimiser l’entraînement en fonction des résultats désirés.

Hypothèses

L’une des hypothèses centrales soulevées par Krajewski et ses collègues concernait l’efficacité des répétitions en touch-and-go par rapport aux répétitions en dead stop lors de l’exécution du deadlift conventionnel. Les auteurs ont postulé que les répétitions en touch-and-go seraient réalisées plus rapidement en raison de l’exploitation du cycle d’étirement-raccourcissement (SSC – Stretch Shortening Cycle), un phénomène physiologique où la phase de contraction musculaire concentrique (phase de levée) est précédée d’une phase de contraction excentrique (phase de descente), créant ainsi une sorte d’élan qui facilite le mouvement suivant.

Ces hypothèses s’appuient sur la compréhension fondamentale de la physique et de la biomécanique du mouvement humain, en particulier sur l’équation du travail (U = Force X Déplacement), suggérant que la force nécessaire pour démarrer un mouvement à partir d’un arrêt complet est supérieure à celle requise pour maintenir le mouvement d’un objet déjà en mouvement.

Méthodologie

Description des participants

L’étude a été menée sur un groupe de 20 hommes expérimentés en deadlift, ce qui fournit une base solide pour analyser les effets des différentes techniques de répétition sur des individus ayant une certaine maîtrise de l’exercice. Ces participants avaient tous au moins un an d’expérience spécifique en deadlift, assurant une familiarité et une compétence technique suffisantes pour minimiser les variables externes pouvant affecter les résultats. Le critère d’inclusion principal était une capacité à réaliser un soulevé de terre maximal (1RM) d’au moins 62 kg, un seuil établi pour garantir que tous les participants avaient un niveau de force de base comparable et pouvaient manipuler les charges de travail prescrites durant l’étude.

Protocole de l’étude

Le protocole de l’étude était rigoureusement conçu pour évaluer et comparer les impacts biomécaniques et de performance des répétitions en touch-and-go par rapport aux répétitions en dead stop. La procédure comprenait plusieurs étapes clés. Tour d’abord, la première visite des participants au laboratoire était dédiée à l’établissement de leur 1RM, une étape cruciale pour déterminer les charges de travail individuelles pour les sessions expérimentales. Cela assurait que les séries de répétitions effectuées durant l’étude représentaient un pourcentage précis de leur capacité maximale, en l’occurrence 75% du 1RM. Après avoir établi le 1RM, les participants ont été familiarisés avec les techniques spécifiques de touch-and-go et de dead stop. Les participants ont ensuite effectué deux sessions expérimentales séparées, l’une avec des répétitions en touch-and-go et l’autre avec des répétitions en dead stop, chacune consistant en 2 séries de 5 répétitions à 75% de leur 1RM. Les sessions étaient espacées de plusieurs jours pour permettre une récupération adéquate. Pendant ces sessions, plusieurs mesures ont été prises, incluant les angles articulaires, les forces de réaction au sol, et le Rating of Perceived Exertion (RPE), fournissant ainsi une analyse complète des différences de performance et de stress biomécanique entre les deux styles de répétition.

Résultats principaux

L’étude de Krajewski et al. (2018) a révélé des différences significatives dans les performances et les contraintes biomécaniques entre les répétitions en touch-and-go et en dead stop lors du deadlift conventionnel.

Temps pour compléter le mouvement

Les répétitions en touch-and-go se distinguent par une exécution plus rapide du mouvement comparativement aux répétitions en dead stop, grâce à l’exploitation efficace du cycle d’étirement-raccourcissement (SSC). Ce phénomène physiologique permet aux muscles pré-étirés de générer une force plus importante lors de la contraction suivante, ce qui facilite une exécution plus rapide du mouvement. Cette rapidité peut être particulièrement bénéfique dans les contextes d’entraînement où le volume et la fréquence des répétitions sont prioritaires. Toutefois, cette efficacité doit être équilibrée avec la nécessité de maintenir une technique correcte pour éviter les blessures.

Travail articulaire total

L’augmentation du travail articulaire total observée avec les répétitions en dead stop souligne le niveau supplémentaire d’effort et de travail mécanique exigé de la part des articulations. Ce travail supplémentaire est principalement dû à la nécessité de surmonter l’inertie au début de chaque levée, imposant ainsi un stress mécanique plus important sur les muscles et les articulations. Cette caractéristique fait des répétitions en dead stop, un choix préférable pour les entraînements axés sur la maximisation de la force. En simulant les conditions d’une levée maximale où chaque répétition débute à partir d’un arrêt complet, les répétitions en dead stop préparent efficacement les athlètes aux performances de force pure.

Force de réaction verticale au sol

La légère augmentation de la force de réaction verticale au sol observée dans les répétitions en touch-and-go est attribuable à l’impact de la barre sur le sol et à la force générée lors du rebond, facilitant le début de la répétition suivante. Bien que cela puisse sembler avantageux en termes d’efficacité, cette caractéristique soulève des questions sur la spécificité de l’entraînement par rapport aux objectifs de performance maximale. Dans les disciplines où la levée à partir d’un arrêt complet est essentiel, comme en powerlifting, cette méthode pourrait ne pas fournir la préparation spécifique nécessaire pour optimiser la performance lors des compétitions.

Impact sur le stress articulaire et la performance

L’analyse des différences entre les styles de répétition en touch-and-go et en dead stop révèle une distinction importante dans leur impact sur le développement de la force et la préparation à des RM. Bien que les répétitions en touch-and-go puissent offrir des avantages en termes de volume d’entraînement et d’efficacité temporelle, elles peuvent ne pas fournir le même niveau de stress mécanique nécessaire pour optimiser la force pure. À l’inverse, les répétitions en dead stop, en exigeant un travail articulaire plus important et en imposant un stress mécanique plus élevé, s’avèrent plus bénéfiques pour les entraînements ciblant l’amélioration de la force et de la puissance musculaire.

Interprétation des résultats et limites de l’étude

Importance du cycle d’étirement-raccourcissement dans les répétitions Touch-and-Go

Le cycle d’étirement-raccourcissement (SSC) joue un rôle fondamental dans la performance des répétitions en touch-and-go, comme l’ont montré les résultats de l’étude de Krajewski et al. Ce phénomène physiologique, qui intervient lorsqu’un muscle est pré-étiré (phase excentrique) juste avant une contraction concentrique (phase de levée), contribue à une production de force accrue. En effet, l’exploitation du SSC permet aux athlètes d’effectuer des répétitions plus rapidement et avec moins de perception de l’effort, ce qui peut se traduire par une augmentation potentielle du volume d’entraînement réalisable dans un temps donné.

Cette efficacité accrue peut être particulièrement avantageuse pour les objectifs d’hypertrophie, où le volume total (nombre de répétitions x charge) est un facteur clé dans la stimulation de la croissance musculaire. Cependant, il est important de noter que bien que les répétitions en touch-and-go puissent faciliter un volume d’entraînement plus élevé, elles pourraient ne pas fournir le même niveau de stress mécanique par répétition que les répétitions en dead stop, ce qui est crucial pour l’optimisation de la force maximale.

Spécificité de l’entraînement en fonction des objectifs : force maximale vs hypertrophie

L’interprétation des résultats soulève des considérations importantes quant à la spécificité de l’entraînement en fonction des objectifs poursuivis. Pour les athlètes et les entraîneurs visant à maximiser la force maximale, les répétitions en dead stop semblent être plus appropriées. Ce style de répétition impose un travail articulaire total plus important et requiert une force de départ accrue à chaque levée, simulant de plus près les conditions d’une répétition maximale (1RM). Cette spécificité d’entraînement est essentielle pour la préparation aux compétitions de powerlifting ou pour tout objectif nécessitant une force explosive à partir d’un arrêt complet.

D’autre part, pour ceux qui se concentrent sur l’hypertrophie ou l’endurance musculaire, les répétitions en touch-and-go peuvent offrir des avantages significatifs en permettant un plus grand volume d’entraînement en moins de temps, grâce à l’efficacité apportée par le SSC. Cependant, il est crucial de garder à l’esprit que l’augmentation du volume ne doit pas se faire au détriment de la qualité du mouvement ou de la sécurité ; chaque répétition doit toujours être exécutée avec une technique correcte pour minimiser le risque de blessure.

Les résultats de Krajewski et al. s’alignent sur les conclusions d’autres études pertinentes dans le domaine, comme celles menées par Wilson et al. (1991), qui ont examiné les relations entre la rigidité musculaire, la flexibilité, et le risque de blessure, ainsi que sur les principes exposés dans le textbook de Guyton and Hall sur la physiologie.

Limites et perspectives

Les résultats de l’étude de Krajewski et al. (2018) ont apporté des contributions significatives à notre compréhension des effets biomécaniques et de performance des répétitions en touch-and-go par rapport aux répétitions en dead stop dans le deadlift conventionnel. Cependant, plusieurs questions demeurent ouvertes, notamment en ce qui concerne l’impact à long terme de ces styles de répétition sur l’hypertrophie et la force.

  • Comparaison à long terme de l’hypertrophie et de la force : Des recherches futures pourraient envisager des protocoles d’entraînement sur plusieurs mois, comparant directement les effets à long terme des répétitions en touch-and-go et en dead stop sur l’hypertrophie musculaire et les gains de force. Ceci permettrait de déterminer si l’un des styles est supérieur pour le développement durable de la force et de la taille musculaire.
  • Analyse du volume d’entraînement : Une étude approfondie sur la manière dont le volume d’entraînement influence les adaptations musculaires et de force en fonction du style de répétition pourrait offrir des aperçus précieux. Cela inclurait l’évaluation de l’efficacité du volume accru permis par les répétitions en touch-and-go par rapport au stress mécanique potentiellement supérieur des répétitions en dead stop.
  • Variabilité individuelle : Examiner la variabilité individuelle en réponse aux styles de répétition pourrait aider à personnaliser davantage les programmes d’entraînement. Certains athlètes peuvent bénéficier plus d’un style que de l’autre en raison de différences dans la composition corporelle, la biomécanique, ou les antécédents d’entraînement.
  • Impact sur la prévention des blessures : Évaluer les implications à long terme des deux styles de répétition sur le risque de blessure serait également bénéfique. Bien que les répétitions en touch-and-go puissent permettre un volume d’entraînement plus élevé, elles pourraient également augmenter le risque de blessures si la technique n’est pas strictement contrôlée.
  • Application à d’autres exercices : Étendre la recherche pour inclure d’autres exercices fondamentaux, tels que le squat et le bench press, fournirait une compréhension plus complète de l’impact des styles de répétition à travers un éventail plus large de mouvements de musculation.

Conclusion

L’étude de Krajewski et al. a mis en lumière des différences significatives entre les répétitions en touch-and-go et en dead stop dans le cadre du deadlift conventionnel, offrant ainsi une perspective précieuse sur l’impact de ces styles sur le stress articulaire, le travail total, et la performance. Les résultats suggèrent que le choix du style de répétition doit être aligné avec les objectifs spécifiques d’entraînement : les répétitions en dead stop pour maximiser la force et le travail articulaire, et les répétitions en touch-and-go pour augmenter le volume d’entraînement et potentiellement favoriser l’hypertrophie. Pour les entraîneurs et les athlètes, ces découvertes soulignent l’importance d’une approche stratégique dans le choix des techniques d’entraînement. Intégrer intelligemment des périodes ou des cycles d’entraînement axés sur l’un ou l’autre style peut aider à maximiser les adaptations désirées, que ce soit en termes de force, d’hypertrophie ou d’endurance musculaire.

Il est également crucial de reconnaître l’importance de la technique dans l’exécution de chaque style de répétition. Une technique incorrecte, surtout dans les répétitions en touch-and-go, peut non seulement réduire l’efficacité de l’entraînement mais aussi augmenter le risque de blessure. Les pratiquants doivent donc veiller à maintenir une forme stricte et à ajuster la charge de travail pour préserver la sécurité et l’efficacité de l’entraînement.

Les pratiquants de musculation et les entraîneurs sont invités à intégrer ces connaissances dans leur pratique, tout en restant ouverts à l’expérimentation et attentifs aux principes de technique et de sécurité. Ce faisant, ils peuvent non seulement améliorer leur performance et atteindre leurs objectifs de manière plus efficace mais aussi contribuer à une pratique de musculation plus sûre et plus scientifiquement informée.

Liste des Références Scientifiques

L’étude complète

Merci pour votre lecture, si vous souhaitez aller plus loin le texte complet de l’étude est disponible ici :

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