Introduction
L’utilisation de contraceptifs hormonaux est courante, mais elle est souvent accompagnée de questions et d’incertitudes concernant leurs effets potentiels sur la capacité à perdre du gras, à gagner du muscle ou à améliorer la force. Malgré la popularité de ces produits, les données scientifiques étaient jusqu’à récemment insuffisantes, laissant place à des spéculations plutôt qu’à des faits établis.
La revue scientifique « Hormonal Contraceptive Use Does Not Affect Strength, Endurance, or Body Composition Adaptations to Combined Strength and Endurance Training in Women » par Myllyaho et al. (2018) s’attaque à cette question. Cette étude se distingue en explorant directement les effets des contraceptifs hormonaux sur les résultats d’entraînement, offrant ainsi des données précieuses pour dissiper les mythes et orienter les choix éclairés des athlètes féminines.
Nous voulons démystifier les notions autour de l’utilisation des contraceptifs hormonaux et de leur impact potentiel sur les performances sportives et la composition corporelle. En présentant les informations de manière claire et concise, cet article servira de guide fiable pour les athlètes féminines et tous ceux intéressés par les interactions entre l’entraînement, la santé et la contraception.
Présentation de l’étude
But de l’étude
L’objectif central de l’étude menée par Myllyaho et al. (2018), intitulée « Hormonal Contraceptive Use Does Not Affect Strength, Endurance, or Body Composition Adaptations to Combined Strength and Endurance Training in Women », était de clarifier les effets des contraceptifs hormonaux monophasiques sur les adaptations à l’entraînement en force et en endurance, ainsi que sur la composition corporelle.
Hypothèses
Les chercheurs partaient de l’hypothèse que l’utilisation de contraceptifs hormonaux pourrait conduire à des améliorations moindres en termes de force, d’endurance et de composition corporelle, en comparaison à celles qui n’utilisent pas de contraceptifs hormonaux. Cette hypothèse s’inscrit dans un contexte plus large de questionnements et d’inquiétudes exprimés par la communauté des athlètes féminines, où prévaut l’idée que les contraceptifs hormonaux pourraient potentiellement entraver les gains musculaires, la perte de graisse ou l’amélioration de la performance sportive.
Références et études complémentaires
Pour appuyer leur recherche, Myllyaho et al. (2018) se réfèrent à plusieurs études antérieures, explorant des sujets connexes. Par exemple, l’étude de Nichols AW et al. (2008), intitulée « Effects of combination oral contraceptives on strength development in women athletes », qui avait également examiné les interactions entre l’utilisation de contraceptifs oraux combinés et le développement de la force chez les athlètes féminines, sans trouver d’impact négatif significatif. De même, les travaux de Ruzić L et al. (2003), se concentrant sur les effets des antiandrogènes présents dans certains contraceptifs sur les gains de force, offrent un contexte important pour comprendre comment différentes formulations hormonales pourraient influencer les réponses à l’entraînement. Ces références croisées enrichissent l’analyse de Myllyaho et al. en situant leurs découvertes dans le cadre plus large des recherches existantes sur le sujet, soulignant l’importance de considérer la composition spécifique des contraceptifs hormonaux lors de l’évaluation de leurs effets sur les performances sportives et la composition corporelle.
Méthodologie
Participants à l’étude
L’étude menée par Myllyaho et al. (2018) a inclus 18 femmes actives physiquement, âgées de 24 à 41 ans. Ce groupe ciblé était composé de femmes ayant une expérience préalable en entraînement d’endurance, mais sans antécédents significatifs en entraînement de résistance. Parmi elles, neuf utilisaient des contraceptifs hormonaux monophasiques depuis au moins un an, tandis que les neuf autres n’avaient jamais utilisé de contraceptifs hormonaux. Ce critère de sélection permettait d’établir une comparaison significative entre les utilisatrices de contraceptifs hormonaux et les non-utilisatrices, en se concentrant spécifiquement sur les impacts potentiels de ces contraceptifs sur les adaptations liées à l’entraînement. Les participantes devaient également être capables de courir au moins 2300 mètres en 12 minutes et avoir des cycles menstruels réguliers, assurant ainsi un niveau de forme physique de base et une homogénéité au sein des groupes.

Conception expérimentale
La conception expérimentale de cette étude impliquait un programme d’entraînement de 10 semaines, combinant des sessions de musculation et d’aérobique de haute intensité. Ce programme était soigneusement structuré pour tester les effets des contraceptifs hormonaux sur la force, l’endurance, et la composition corporelle dans des conditions d’entraînement optimisées.
Pour la musculation, les participantes s’engageaient dans deux sessions hebdomadaires, suivant une approche linéairement périodisée. Les charges utilisées commençaient à 50% du poids maximal qu’une participante pouvait soulever une fois (1RM) et augmentaient progressivement jusqu’à 85% du 1RM au cours de l’étude. Les exercices ciblaient principalement le bas du corps, incluant des squats, de la presse à cuisses, du leg extension, et des extensions mollets, en plus d’une variété d’exercices de sauts.
Pour l’aérobique de haute intensité, les sessions incluaient un jour de quatre courses de quatre minutes chacune, avec des intensités croissantes de 70% à 90% de la fréquence cardiaque maximale. Le deuxième jour consistait en trois séries de trois sprints de 100 mètres à pleine intensité, avec deux minutes de repos entre chaque sprint et cinq minutes entre les séries. Les participantes étaient également encouragées à réaliser une session de cardio de faible intensité par semaine, bien que cette dernière ne soit pas surveillée par l’équipe de recherche.
Tous les paramètres de performance et de composition corporelle étaient évalués avant et après la période d’entraînement de 10 semaines, et ces évaluations étaient programmées pour se dérouler durant les cinq premiers jours du cycle menstruel des participantes. Les mesures de performance incluaient la force isométrique de la presse à cuisses, le 1RM de la presse à cuisses, la hauteur du saut contre-mouvement, et le temps sur une course de 3000 mètres. La composition corporelle était évaluée en termes de masse maigre et de pourcentage de graisse corporelle, mesurés par absorptiométrie à rayons X à double énergie (DXA).
Résultats
Améliorations et comparaisons
Les résultats de l’étude de Myllyaho et al. (2018) révèlent des aperçus significatifs sur l’impact des contraceptifs hormonaux sur l’entraînement chez les femmes. Les améliorations observées dans les deux groupes, tant chez les utilisatrices de contraceptifs hormonaux que chez les non-utilisatrices, montrent une tendance positive similaire en ce qui concerne la force isométrique de la presse à jambes, la hauteur du saut contre-mouvement, les temps de course sur 3000 mètres, la masse maigre et le pourcentage de graisse corporelle.
De manière significative, aucune différence notable n’a été observée entre les deux groupes pour la plupart des paramètres mesurés. Par exemple, les augmentations de la force isométrique de presse à jambes et du 1RM de la presse à cuisses étaient presque identiques entre les utilisatrices de contraceptifs hormonaux et les non-utilisatrices, indiquant que l’utilisation de contraceptifs hormonaux n’entravait pas les gains de force musculaire. De même, les améliorations en termes de hauteur de saut et de temps sur 3000 mètres étaient comparables, suggérant que l’endurance et la puissance des sauts ne sont pas affectées négativement par l’utilisation de contraceptifs hormonaux.

Quant à la composition corporelle, les résultats ont montré une réduction similaire du pourcentage de graisse corporelle et une augmentation de la masse maigre dans les deux groupes. Cela réfute l’idée répandue selon laquelle les contraceptifs hormonaux pourraient empêcher la perte de graisse ou la prise de muscle chez les femmes engagées dans des programmes d’entraînement intensifs.

Analyse des données
L’analyse des données de cette étude mérite une attention particulière, non seulement pour les résultats eux-mêmes mais aussi pour la manière dont ils ont été interprétés. Les chercheurs ont pris grand soin d’évaluer les tailles d’effet et les potentiels erreurs dans la collecte et l’analyse des données. Bien que les améliorations pour certains paramètres étaient légèrement plus élevées chez les utilisatrices de contraceptifs hormonaux, ces différences n’étaient pas statistiquement significatives, ce qui suggère que les variations observées relèvent du hasard plutôt que d’une véritable influence des contraceptifs.
Il est crucial de noter que, malgré quelques erreurs de reporting sur des données hormonales secondaires, ces écarts n’ont pas affecté la conclusion principale de l’étude. Les tailles d’effet, même lorsque calculées sur des bases pourcentuelles légèrement différentes, indiquent clairement que l’impact des contraceptifs hormonaux sur les adaptations à l’entraînement est minimal. Ces résultats sont cohérents avec ceux d’autres études citées, telles que celle de Nichols AW et al. (2008), renforçant l’idée que les contraceptifs hormonaux n’entravent pas significativement les performances physiques ou les adaptations à l’entraînement chez les femmes.
Interprétation des Résultats
Implications pour les athlètes féminines
L’étude de Myllyaho et al. (2018) apporte des nouvelles rassurantes pour les athlètes féminines qui utilisent des contraceptifs hormonaux : l’impact de ces contraceptifs sur les adaptations à l’entraînement est minimal. Cette conclusion soulève un point crucial concernant le choix du type de contraceptif. Alors que l’étude se concentrait sur les contraceptifs hormonaux monophasiques, il est essentiel pour les athlètes d’évaluer attentivement leurs options avec l’aide de professionnels de la santé. Les résultats suggèrent que les préoccupations concernant les effets négatifs des contraceptifs hormonaux sur la performance sportive et la composition corporelle peuvent être majoritairement infondées. Cependant, il est important de noter que le type spécifique de contraceptif peut avoir des implications différentes, et les choix doivent être faits en considérant les besoins individuels et les conseils médicaux professionnels.
Discussion sur les données rapportées et les tailles d’effet
L’analyse critique de Myllyaho et al. (2018) révèle également l’importance de l’interprétation prudente des données et des tailles d’effet dans les études scientifiques. Certaines anomalies dans la présentation des résultats, notamment en ce qui concerne les données hormonales et les effets signalés, mettent en lumière les défis associés à l’interprétation des changements en pourcentage et des tailles d’effet. Ces anomalies soulignent l’importance cruciale d’une lecture critique des études scientifiques, ne se limitant pas aux résumés mais s’étendant à une analyse détaillée de la méthodologie, des résultats, et de leur présentation.
Futurs axes de recherche
La recherche menée par Myllyaho et al. (2018) ouvre la porte à de nouvelles questions et avenues d’exploration concernant l’impact des différentes options de contraception sur la santé et la performance des athlètes féminines. Les futurs axes de recherche pourraient inclure des études approfondies sur les effets spécifiques des divers types de contraceptifs hormonaux, y compris ceux qui contiennent des combinaisons différentes d’estrogènes et de progestatifs, sur la croissance musculaire et les gains de force. Il serait également pertinent d’examiner l’impact à long terme de l’utilisation de contraceptifs sur l’endurance et la récupération post-entraînement. De plus, la recherche pourrait s’étendre pour inclure des analyses sur comment les cycles menstruels naturels et modifiés par la contraception influencent la réponse au type et à l’intensité de l’entraînement.
Conclusion
L’étude « Hormonal Contraceptive Use Does Not Affect Strength, Endurance, or Body Composition Adaptations to Combined Strength and Endurance Training in Women » par Myllyaho et al. (2018) représente un jalon important dans la compréhension de l’impact des contraceptifs hormonaux sur les performances physiques et la composition corporelle des femmes. Les principales découvertes de cette recherche montrent que l’utilisation de contraceptifs hormonaux monophasiques n’affecte pas négativement la force, l’endurance, ou la composition corporelle des femmes suivant un programme d’entraînement combiné en résistance et en aérobic de haute intensité sur une période de 10 semaines. Ces résultats sont particulièrement significatifs dans le contexte des préoccupations fréquentes parmi les athlètes féminines concernant les effets potentiels des contraceptifs sur leurs capacités d’entraînement et leurs objectifs de performance.
L’importance de cette étude réside dans sa capacité à rassurer les athlètes féminines sur le fait que les choix de contraception hormonale, spécifiquement les contraceptifs monophasiques étudiés, peuvent être compatibles avec des objectifs de haute performance sportive. Cependant, il est essentiel de souligner que les décisions concernant la contraception doivent toujours être prises en consultation avec un professionnel de la santé. C
ette étude rappelle l’importance cruciale d’une collaboration étroite entre athlètes, entraîneurs, et professionnels de la santé pour naviguer dans les choix liés à la contraception et à l’entraînement, garantissant ainsi que chaque athlète féminine peut atteindre son plein potentiel.
Liste des Références Scientifiques
- Myllyaho MM, Ihalainen JK, Hackney AC, Valtonen M, Nummela A, Vaara E, Häkkinen K, Kyröläinen H, Taipale RS. Hormonal Contraceptive Use Does Not Affect Strength, Endurance, or Body Composition Adaptations to Combined Strength and Endurance Training in Women. J Strength Cond Res. 2018 Jun 20.
- Nichols AW, Hetzler RK, Villanueva RJ, Stickley CD, Kimura IF. Effects of combination oral contraceptives on strength development in women athletes. J Strength Cond Res. 2008 Sep;22(5):1625-32.
- Ruzić L, Matković BR, Leko G. Antiandrogens in hormonal contraception limit muscle strength gain in strength training: comparison study. Croat Med J. 2003 Feb;44(1):65-8.
- Berenson AB, Rahman M. Changes in weight, total fat, percent body fat, and central-to-peripheral fat ratio associated with injectable and oral contraceptive use. Am J Obstet Gynecol. 2009 Mar;200(3):329.e1-8.
- Gallo MF, Lopez LM, Grimes DA, Carayon F, Schulz KF, Helmerhorst FM. Combination contraceptives: effects on weight. Cochrane Database Syst Rev. 2014 Jan 29;(1):CD003987.
- Martin D, Sale C, Cooper SB, Elliott-Sale KJ. Period Prevalence and Perceived Side Effects of Hormonal Contraceptive Use and the Menstrual Cycle in Elite Athletes. Int J Sports Physiol Perform. 2018 Aug 1;13(7):926-932.
- Lee CW, Newman MA, Riechman SE. Oral Contraceptive Use Impairs Muscle Gains in Young Women. FASEB Journal. 2009 Apr;23(1).
L’étude complète
Merci pour votre lecture, si vous souhaitez aller plus loin le texte complet de l’étude est disponible ici :
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